vendredi 19 novembre 2010

Un enfant, absolument !



« Ma puce, Maman est bientôt en vacances, j’avais envie de faire un grand voyage avec toi». 
Hannah parlait doucement, pour être bien sûre de se faire comprendre par sa petite puce chérie, mais aussi parce que des imbéciles ayant gagné leur permis de conduire dans quelque boîte surprise, s’amusaient à déboîter sans regarder dans leurs rétroviseurs. Freiner, accélérer, freiner, accélérer. Maintenant elle était irritée ! 
« Qu’aurait tu envie de faire Chérie ?» 
Aucune réponse. Hannah se concentra sur la route. Toujours ces embouteillages. Le panneaux de signalisation vomit un temps d’attente : 1 heure... Bien, c’était vendredi, elle était enfin en weekend, elle avait récupérée sa petite protégée, qui était sur le siège arrière, sans bouger.
« Comment s’est passée ta journée ?»
Silence. Hannah tenta d’avaler sa colère. Charlotte la préoccupait beaucoup, vraiment beaucoup. A six ans, elle n’avait toujours pas prononcé un seul mot. Quelques petits bruits de temps en temps et encore ... Elle l’avait adopté lorsqu’elle avait un an et demi environ. Elle marchait déjà très bien, oui, ça pour marcher elle marchait.
Elle regarda dans son rétroviseur intérieur. Sa petite Charlotte adorée était là. Elle avait envie de sortir de la voiture et d’aller la retrouver à l’arrière pour jouer, pour être transportée loin de son quotidien pollué, gris et fatiguant. Ses belles boucles blondes, ses yeux marrons, son regard joueur. Elle était magnifique.
« Tu es belle, mon bébé. Ce soir maman va te faire ton plat favoris, tu vas te régaler !»
Bien sûr toujours aucune réponse. Hannah avait commencé à s’inquièter lorsque Cha’ entrait dans sa quatrième année. Elle était vive, mangeais bien, très bien même, grandissait vite, mais ne voulait pas parler. Silence troublant, gênant même. A quatre ans, ce n’est plus un bébé, elle devrait parler, un peu, essayer au moins. Les seuls bruits qu’elle émettait, s’était durant la nuit. Elle rêvait, comme tout le monde. Mais souvent, en plein milieux de ses nuits, Hannah devait aller la calmer, soit en tendant le bras juste à côté d’elle, soit en se levant pour aller, d’un pas rapide, dans la chambre de son petit coeur. A cinq ans, Charlotte ne parlait toujours pas. Sa maman la laissait venir se glisser dans les draps en pleine nuit. Elle aimait l’entendre rentrer dans la chambre, discrètement, puis avec un petit élan, grimper sur le lit et se rendormir dans les minutes qui suivaient son intrusion. Elle était tellement belle lorsqu’elle dormait. Cet impression d’apaisement lui donnait un visage d’ange. Un ange muet.
« Nous sommes bientôt à la maison ma chérie»
Elle vivait seule. Mère célibataire, rien d’original là dedans, rien de choquant non plus. Elle s’en sortait bien. Elle déposait Charlotte à la garderie le matin, la récupérait le soir, travaillait le mieux qu’elle pouvait. Quelques mois après son cinquième anniversaire, elle avait pris un rendez vous chez son médecin généraliste. Dans la salle d’attente, elle avait senti tous ces regards sur elle. Elle détestait devoir attendre entourée de tous ces malades, qui vous observent de haut en bas, qui regardent vos chaussures entre deux quintes de toux, qui tentaient de savoir pourquoi vous étiez là. Ils avaient regardé Charlotte comme si ils savaient. Etait ce une honte de ne pas savoir parler lorsqu’on à cinq ans et quatre mois ? Enfin c’était son tour. Ca devait être l’une des dernières patiente, il était presque vingt heures. Charlotte avait faim, elle le savait. Elle s’était installée sur le siège en face du médecin et avait expliqué le petit problème de sa Charlotte chérie. Le médecin se dandinait sur sa chaise, évitait de croiser le regard de la mère, mais aussi de la fille. Etait ce vraiment aussi grave que cela ? 
« Il y a eu un petit accident sur la route ma puce. Nous allons encore devoir patienter un peu.»
Hannah se pencha sur le siège passager pour tenter d’attraper quelque chose dans la boîte à gants. Elle ne se pressait pas, de toute façon elle était encore dans les embouteillages pour un bon bout de temps. Elle pris le paquet de biscuits, les préférés de Charlotte.
« Tiens Cha’, mon petit doigt m’a dit que tu avais faim !»
Charlotte dévora le biscuit. Elle mourrait de faim, c’était indéniable. Hannah replongea dans ses souvenirs.
Elle se souvenait de la réponse exact du médecin : « Ecoutez Madame Rose, je ne suis pas habilité à traiter ce genre de pathologie, ni cette catégorie d’individu». Elle était repartie furieuse du cabinet, sans même avoir payé. Accepter que son enfant était malade, elle ne le pouvait pas. C’était inconcevable d’abandonner aussi vite, au premier échec. Pour un temps, elle allait se débrouiller seule, et faire parler son bébé. 
Puis on fêta son sixième anniversaire. C’était il y a une semaine. Au fond d’elle, Hannah avait rêvé que son amour, pour ce jour bien précis, allait prononcer ne serait ce qu’une syllabe. Rien. 
Elle réalisa qu’elle était devant sa maison. Il y avait une voiture de stationnée devant le garage. La colère se réveilla. Elle stoppa la voiture devant la porte d’entrée, pour pouvoir mettre rapidement Charlotte à l’abris. Telle une héroïne de bande dessinée, notre super maman sortit de sa voiture, prit Charlotte chérie dans les bras, puis la déposa dans la maison, bien au chaud. Deux minutes plus tard, elle était elle aussi à l’abris, enfin à la maison. Charlotte était déjà partie s’installer confortablement sur le fauteuil, avec son jouet favoris. 
« Coucou Maman !»
« Marie ! C’est à toi la voiture devant le garage»
« J’avais déjà cette voiture l’année dernière, tu ne te souviens pas ?»
Hannah réfléchissait. Elle n’avait pas eu de visite depuis longtemps. Depuis Marie en fait.
« Si si bien sûr, mais j’étais ailleurs. Tu sais je m’inquiète pour ta soeur.»
« Oh oui, je sais. Tu as l’air fatiguée. Si tu en as envie, tu peux aller te coucher le temps que je m’occupe de Charlotte.»
« Merci ma Chérie, merci beaucoup, je suis vraiment très fatiguée. Elle n’a toujours pas prononcée un mot tu sais...»
Marie fit semblant de ne pas entendre. A chacune de ses visites, il en était de même. Charlotte ci, Charlotte là.
« Ne t’inquiète pas, vas te reposer !».
Charlotte était toujours sur le canapé. Elle avait cet air de « chien battu », elle avait faim. Marie cria :
« CHARLOTTE !!! Arrête de mastiquer ton jouet et viens. Ta gamelle est prête. »

vendredi 12 novembre 2010

Va savoir.




Difficile de se dire qu'il y a dix ans, un matin d'automne, j'allais me réveiller et apprendre que mon père était mort et que jamais plus je ne le reverrai. Son coeur avait décidé de s'arrêter, de tomber dans un profond sommeil, de laisser le désespoir et l'alcool l'anéantir. 

J'ai continué à poser mes questions idiotes. Savoir quand Papa allait revenir, s'il était parti loin, si on avait reçu une lettre de lui.

Et puis j'ai réalisé, bombe qui est venue exploser dans mon estomac.


Le marbre, les chaises en bois, les courants d'air froids, le monde et enfin son lit de bois, ses fleurs, son cadavre. C'est comme si j'avais laissé dans ce cercueil mon enfance et mon insouciance. 
Pourtant, chaque jour qui passaient, je me disais qu'à un moment ou à un autre j'allais le revoir, je pensais qu'il faisait un petit voyage, mais que j'allais le rejoindre. 
Le jour de l'enterrement j'ai compris qu'il me faudrait mourir pour "le rejoindre". Et j'ai aussi compris que ce n'étais pas ce que je voulais, que je pouvais pas aller le retrouver, que plus jamais je ne le verrai. Après cette belle journée où le vent d'automne avait enfin faiblis et que le temps était devenu froid, mais sec, on a plus jamais parlé de Papa. N'était mort un point c'est tout.
Pour ne plus penser, me suis mise à lire. Tout ce qui me passait dans les mains, je le dévorais. Fallait que j'oublie, fallait que je m'occupe, que je me débrouille. Après me suis mise au sport. Pour voir où étaient mes limites, pour savoir quand est ce que mon corps allait dire stop. Aujourd'hui je continue ce jeu absurde. 

Ne sais pas de quoi il est mort : suicide ? Cancer ? Crise cardiaque ? Va savoir... Enfin le résultant n'en reste pas moins le même : Sa Mort.

mardi 9 novembre 2010

V ...




« Voilà ! À première vue je ne suis qu'un vulgaire comédien de vaudeville, à qui les vicissitudes de la vie font jouer le vilain et la victime et vice-versa. Ce visage n'est pas que le vil reflet de ma vanité mais un vibrant vestige de la vox populi aujourd'hui vacillante et vaincue. Vous devez y voir, les vieux restes d'une vexation vieillissante aussi vive que vivante et vouée à vaincre cette vermine vulgaire vivace virulente et vénale qui vivote en privant ses valeureuses victimes vaincues de la vérité et des vraies valeurs ! Le seul verdict que je vois est la vengeance. Une vendetta violente brandie tel un ex-voto et non en vain visant à faire vaincre la vertu face à cette vilénie lovée dans les veines de nos villes. Ces vagues vocales faisant de moi un ventriloque vociférant ces volutes verbales, revenons-en à l'essentiel. Je suis honoré de vous rencontrer alors pour vous, je serai V. »

mardi 2 novembre 2010

Souffle !




Plus claire la lumière, plus sombre l'obscurité... Il est impossible d'apprécier correctement la lumière sans connaître les ténèbres.