samedi 30 janvier 2010

Calme et volupté.

Partie courir. Vent froid, ciel bleu, blanc près du soleil, respiration saccadée. Ne sent pas le sol sous ses pieds, ne ressent plus rien en fait. Hurlement silencieux, suivant le rythme des ses foulées.
Fait son tour habituel. Prend son temps de passage. Gagne plus d'une minute trente par rapport aux mois précédents. Mais là n'est pas la question.
Elle respire avec difficulté, impression des tomber, d'être ailleurs, comme si elle était hors d’atteinte ! C'est ce moment qu'elle recherche lorsqu’elle met un pied devant l'autre, lorsque son combat contre elle-même débute. Et là, seule, comme hors de son corps, elle n'entend que l'eau qui coule et vit près d'elle. Comme un chuchotement qui l'appel, qui lui demande de la regarder. Elle avance, sans réellement savoir ce qu'elle fait, s'approche de la rive et s'assoie. Regard comateux sur l'eau qui coule, froissement de la réalité environnante, flou permanent dans ces remous. Et elle se sent happée par tant de calme et de maitrise.
Vague de colère et courant d'espoir. Tout se mélange mais l'eau, elle, reste la même, imperturbable.
Ferme les yeux et écoute. Impression de sentir quelqu'un près d'elle, qui se baigne peut être, qui lui murmure des mots qu'elle ne comprend pas.
Sons mélodieux et voix sucrée. Houle de souvenirs, corps qui se crispe, bouche qui se sert. Mais l'eau l'apaise, lui montre le contrôle et elle comprend qu'elle doit laisser ses souvenirs se noyer ici, et aller nager ailleurs, laisser la nature suivre son cours et continuer sa propre course, seule.
Elle se lève et se remet à courir. Remet son chrono en route et c'est repartit. Mais elle ne peut plus s'arrêter. Voudrait courir jusqu'au bout du monde, s'épuiser, reprendre ses forces près de l'eau et recommencer.
N'a jamais couru aussi longtemps, 2 Heures 58 minutes et 28 secondes. Fallait qu'elle rentre. Personne pour l'accueillir, personne pour la soutenir. Jambes incontrôlables, tête lourde, regard vide.
Se souvient des paroles de sa mère, datant de la veille : " Je n'ai plus qu'un an à tenir avant de mourir. Je serai sûre à ce moment là que tu ne seras placée nul part." Les paroles résonnent, n'arrive pas à trouver le sens, comprend rien. Ne va pas mourir de maladie, pas un ultimatum des médecins qui vous disent le nombre de jours qu'il vous reste à vivre. Non, c'est SA décision, comme si chaque jour étaient une lutte contre la mort pour le bien de sa fille. Et dans un an, va l'abandonner, comme cela, va la laisser sans repères.
Et l'eau coulera toujours avec autant de calme et de volupté qu'aujourd'hui.

1 commentaire:

  1. C'est ce genre de texte qui m'a fait découvrir la personne que tu es, cette envie folle de courir, ce besoin d'être apaisé. Tu sais ces mots qu'elle t'as dit à cette époque jamais elle ne les a réellement pensé, demain elle sera encore là, jamais tu ne seras coupable de quoique ce soit, elle vie car elle a au fond d'elle cette envie de vivre.
    J'espère que tu te rappelleras que ça ne sert à rien d'oublier, il faut vivre avec ses souvenirs ne pas essayer de les faire plonger au fond de cette rivière où tout semble si tranquille, où tout semble se mélanger, couler dans un flot calme et paisible.

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